Si la culture est ce qui reste quand on a tout oublié, alors sûrement qui veut transmettre la joie, la bonté et la bonne humeur se doit de raconter l’histoire des Marx Brothers, les premiers dadaïstes du show-business.
Combien, qui ont presque tout oublié de ce quintet devenu trio hilarant, se souviennent seulement de quelques expressions, de quelques mots, parfois d’aucun, mais raffolent cependant de ses visages expressifs, de ces dégaines traditionnels, nouvelle commedia dell’arte, revue et corrigée par l’acidité et l’autodérision de l’humour juif new-yorkais et reposant sur une perpétuelle émulation entre les partenaires.
Ce n’est pas un humour pour intellectuels raffinés mais c’est une façon d’être et de faire qui nous parle au plus profond, qui raconte une belle histoire, celle de familles venues d’Europe de l’est, attirées par les lumières de l’Amérique, celle du yiddishland englouti, celle du peuple juif mais pas que, depuis la nuit des temps.
Les Marx Brothers formaient dans la vie une famille de cinq frères : Groucho, Harpo, Chico, Gummo et Zeppo. Leur carrière au cinéma, mais aussi à la télévision et sur scène, notamment à Broadway, s’étend du début du siècle (1905) jusque dans les années 1950.
Nés à New York dans une famille d’origine alsacienne, c’est leur mère, Minnie Marx, qui leur met le pied à l’étrier. Issue du monde du spectacle, Minnie Marx prend très tôt en main l’éducation artistique de ses enfants, encouragés, très jeunes, à développer divers talents : le théâtre, la musique, la danse, et tout particulièrement le chant.
Chico devient un excellent pianiste, tandis que Harpo se consacre à l’instrument qui lui donnera son nom de scène : la harpe. Groucho s’exerce à la guitare, mais il commence par être chanteur soliste, domaine dans lequel ses compétences lui valent d’être le premier de la famille à monter sur les planches. Gummo et Zeppo, quand ils accompagnent leurs frères, sont également de bons chanteurs. Les talents musicaux des frères Marx seront un atout très exploité dans leurs films.
Au début des années 1920, les Marx Brothers sont déjà très populaires au music-hall.
En mai 1924, ils y jouent leur premier grand spectacle, une comédie musicale à gros budget intitulée I’ll Say She Is. Entre-temps, les personnages se sont peu à peu approchés de la version que nous leur connaissons : pendant et après la Première Guerre mondiale, pour des raisons évidentes, Groucho abandonne son accent allemand. Il adopte sa démarche caractéristique et commence à arborer les deux accessoires qui sont devenus sa signature : son énorme moustache et son gros cigare.
Harpo ne se sépare plus de sa perruque, de son pantalon trop grand ni de sa corne de brume. Chico ne perd pas son accent italien et commence à porter parfois un chapeau. Quant à Zeppo, il a repris le rôle de jeune gentleman ingénu, tenu autrefois par Gummo.
À partir de 1930, après signature d’un contrat avec la Paramount, c’est au cinéma que les Marx Brothers apparaissent le plus souvent, bien qu’ils conservent leur amour pour la scène.
En 1934, Zeppo décide de quitter le quatuor pour devenir agent artistique. Trois années plus tard, il fonde, avec Alan Miller et son frère Gummo (qui a fait le même choix de carrière après la guerre), l’une des plus grosses agences artistiques hollywoodiennes, la Marx-Miller-Marx Agency.
Les Marx Brothers ont semé un désordre indescriptible sur la pellicule. Sur les plateaux, ils étaient intenables.
Moins connus que leurs homologues (Chaplin ou Buster Keaton), les Marx Brothers (nés Marks) ont bâti une œuvre folle, unique et hilarante, centrée sur le chaos et l’absurde.
Et finalement ce furent les seuls à porter au comble du raffinement et du délire un art hérité des clowns, à attaquer l’establishment bourgeois de l’intérieur. Chapeau !